ATELIER ALBERT COHEN

Groupe de recherches universitaires sur Albert Cohen

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The News

Fallait-il proposer le portrait de Mangeclous aux épreuves du bac technologique ?

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Nous reproduisons ici les interrogations de Catherine Henri sur l'opportunité de proposer, à l'épreuve anticipée du bac de français en section technologique, ce portrait de Mangeclous qui, lu au premier degré par certains élèves, pourrait prêter à de fâcheux contresens. 


L’amour de l’argent d’un juif menteur aux pieds sales : un bon sujet du bac français ?

Publicité dans le quotidien

Publicité dans le quotidien "Le Matin", 1941

La littérature n'étant, comme chacun sait, pas faite de bons sentiments, de propos forcément convenables ni d'histoires à l'eau de rose, le choix d'un sujet au baccalauréat de français peut-il pour autant s'abstraire de toute considération liée au contexte social et politique ? Les concepteurs des sujets, et avec eux tous les membres de la longue chaîne de décision qui mène à leur validation, sont-ils, au nom de l'autonomie de la littérature, dispensés de tout discernement ?  C'est la question que pose dans le texte ci-dessous, avec ses termes à elle, Catherine Henri, écrivain, agrégée de lettres et professeur au lycée polyvalent Louis-Armand dans le 15ème arrondissement de Paris.

L.C.

Il s’agit seulement  de faire état , disons  au moins  d’une certaine perplexité,  à propos du texte suivant,  proposé  au commentaire à l’épreuve anticipée du bac français pour toutes les séries technologiques (STI, STMG, STL etc) :

[ « Albert Cohen, Mangeclous

Le roman raconte la vie de six compères et cousins juifs, sur l’île de Céphalonie, en Grèce.

« Le premier qui arriva fut Pinhas Solal, dit Mangeclous. C’était un ardent, maigre et long phtisique à la barbe fourchue, au visage décharné et tourmenté, aux pommettes rouges, aux immenses pieds nus, tannés, fort sales, osseux, poilus et veineux, et dont les orteils étaient effrayamment écartés. Il ne portait jamais de chaussures, prétendant que ses extrémités étaient « de grande délicatesse ». Par contre, il était, comme d’habitude, coiffé d’un haut-de-forme et revêtu d’une redingote crasseuse — et ce, pour honorer sa profession de faux avocat qu’il appelait « mon apostolat ».

Mangeclous était surnommé aussi Capitaine des Vents à cause d’une particularité physiologique dont il était vain. Un de ses autres surnoms était Parole d’Honneur — expression dont il émaillait ses discours peu véridiques. Tuberculeux depuis un quart de siècle mais fort gaillard, il était doté d’une toux si vibrante qu’elle avait fait tomber un soir le lampadaire de la synagogue. Son appétit était célèbre dans tout l’Orient non moins que son éloquence et son amour immodéré de l’argent. Presque toujours il se promenait en traînant une voiturette qui contenait des boissons glacées et des victuailles à lui seul destinées. On l’appelait Mangeclous parce que, prétendait-il avec le sourire sardonique qui lui était coutumier, il avait en son enfance dévoré une douzaine de vis pour calmer son inexorable faim. Une profonde rigole médiane traversait son crâne hâlé et chauve auquel elle donnait l’aspect d’une selle. Il déposait en cette dépression divers objets tels que cigarettes ou crayons. » ]

« Est-ce que vous ne pensez pas que… ? »

Lors de la réunion d’harmonisation destinée aux modérateurs, (qui devront en répercuter les conclusions sur les correcteurs de leur propre jury), ce qui vient d’abord, puisque le jeu est toujours de pinailler sur le sujet, ce sont des  réticences techniques, de minces  réserves : neuf notes de vocabulaire, pour un texte de vingt lignes, est-ce bien raisonnable ? Beaucoup étaient indispensables mais il en manquait à mon avis au moins une : bizarrement rien sur l’assez mystérieux (pour des élèves) « Capitaine des vents », qui pourrait pourtant engendrer une méprise. « On » a cru bon de ne pas faire référence au caractère anal de la formule, ce qui revient à  la censurer. C’est donc un  détail qui  a choqué les concepteurs, le côté péteur du personnage, mais pas l’ensemble du texte.

La vraie question est posée tardivement, timidement : « Est-ce que vous ne pensez pas que… ? Dérive possible …? Peut être lu comme raciste…?» Les inspecteurs n’accordent  qu’une réponse pleine d’équivoque : « Ce ne serait pas acceptable » … « Mais encore ? Faudrait-il sanctionner  la copie? Comment ? » Une autre question vient opportunément recouvrir une petite gêne à peine palpable. Rien dans le corrigé national proposé à chaque correcteur («  Un personnage à la fois comique et repoussant  etc ») ne soulève le problème. Une page neutre, sans aucune hésitation, aucune faille, aucun trou.

Tous familiers du second degré ?

Je ne dois pourtant pas être la seule à penser qu’il n’est peut-être pas très pertinent (ni malin, ni même politiquement correct ) de  balancer le jour du bac un texte présentant une image de juif laid, menteur, ridicule, avide, parmi d’autres images de « monstres », la grande Nanon d’Eugénie Grandet, le Gwynplaine de L’Homme qui rit, les gueules cassées de La Chambre des officiers, et faire de ce texte précisément  l’objet du commentaire .

Pour un professeur, ou un bon lecteur, il ne peut y avoir aucune ambiguïté : on est dans la loufoquerie, l’héroï-comique, quelque chose comme du Rabelais moderne. Mais les élèves sont-ils tous familiers du second degré ? De la distance ? Avant même de commencer à corriger mes copies, certains soupçons s'imposent, qui seront confirmés au moment de la correction. On peut se douter que ce texte a pu choquer quelques élèves juifs, même s’ils ont pu repérer que l’auteur l’était, et espérer qu’ils sont  familiers de Woody Allen, et de l’humour juif souvent fondé sur l’autodérision.

On peut aussi supposer que ce texte a pu provoquer bêtement,  dans certaines copies, un discours antisémite, qui plus est sous couvert d’anonymat, discours  qui devrait  sans doute être sanctionné, puisque c’est la loi, bien que les inspecteurs n’aient rien  dit en ce sens, et même refusé de répondre précisément.  Ce qui pose d’ailleurs un autre problème : est-il légitime  de  juger des copies d’examen sur  des critères éthico-politiques ?

Certains élèves trop malins pour se laisser prendre à ce qu’ils ont pu penser être un piège, ont dû  peut-être secrètement jubiler  devant un texte qui ne pouvait, au premier degré, que leur plaire, même au prix d’un contre-sens. Un texte estampillé officiel, puisque proposé au bac.

Ne pas voir et ne pas vouloir voir

Naturellement, je ne plaide pas pour une autocensure des professeurs dans le choix des textes à étudier en classe, qui font l’objet d’un travail d’explicitation  et d’analyse. Il me paraît bien au contraire justifié, et même nécessaire, qu’on puisse parler de religion,  d’éducation des femmes, ou de racisme,  et s’interdire certains sujets conduirait à mettre à l’index des pans entiers de la littérature. En revanche, je ne crois pas que le jour du bac, lors d’une épreuve nationale, sans explication, sans une présence, sans une parole, ce soit judicieux.

Mise à jour le Mercredi, 02 Juillet 2014 12:49 Lire la suite...
 

Joël Dicker lecteur d'Albert Cohen

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Joël Dicker marqué par le roman d'Albert Cohen : Belle du Seigneur

Source : RTL


Le prix Goncourt des lycéens et lauréat du Grand prix du roman de l'Académie française, Joël Dicker ( "La vérité sur l'affaire Harry Québert") se souvient d'un roman d'Albert Cohen : "Belle du Seigneur".

Joël Dickera été couronné cette année du Goncourt des lycéens et du Grand prix du roman de l'Académie française, pour son roman La vérité sur l'affaire Harry Québert. Le jeune prodige originaire de Genève se souvient d'une lecture marquante d'un écrivain de chez lui : Albert Cohen.

Mise à jour le Dimanche, 04 Août 2013 11:06 Lire la suite...
 

Critiques du film Belle du Seigneur de Glenio Bonder

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Premières critiques du film Belle du Seigneur de Glenio Bonder


Une interview de Philippe Zard sur le site myboox.fr


Interrogé par la journaliste Lauren Malka (myboox.fr), Philippe Zard a exprimé ses inquiétudes avant le film ; recontacté après avoir vu le film, il a exposé ses profondes réserves sur la réalisation de Glenio Bonder.

Extraits :


"Même envisagé pour lui-même, en faisant abstraction du roman, ce film reste un exercice artificiel, qui glisse sans laisser en vous aucune empreinte émotionnelle. Quelques passages réussis, certes, mais beaucoup d’ennui, et le sentiment consternant d’une œuvre superflue. J’ai beau essayer de me concentrer sur ce qui se passe à l’écran, je ne vois que des silhouettes qui gesticulent sans rime ni raison, auxquelles il m’est impossible de m’attacher ou même de m’intéresser sérieusement. En art, l’absence d’émotion est un péché capital.
À vrai dire, ce n’est même pas un navet, ce n’est même pas une catastrophe, c’est simplement un film qu’on oublie presque aussitôt qu’on l’a vu – c'est-à-dire tout le contraire du roman."
[...]
Bonder a surtout eu de la peine à sacrifier quoi que ce soit, il a tenu à mettre "un peu de tout" : un peu d’Adrien, un peu de Mariette, un peu des Deume, un peu de Berlin, un peu de SDN, etc. Seuls les Valeureux et Rachel passent entièrement à la trappe (heureusement, en un sens, qu’ils ne sont pas mêlés à ce ratage). Mais en mettant "un peu de tout", on ne fait pas un film, on ne fait rien : une succession de scènes qui, presque systématiquement, crèvent comme des bulles éphémères à la surface de l’eau.
[...]
Dans ce film, encore une fois, on ne va jamais jusqu’au bout : ni jusqu’au bout de la sensualité, ni jusqu’au bout de la passion, ni jusqu’au bout de la satire, ni jusqu’au bout de la cruauté…
[...]
Quelques secondes de grâce parfois, dans la manière de filmer l’actrice devant son miroir ou quelques minutes de tendresse et de vulnérabilité dans le couple. La scène de la synagogue de Berlin, avec ces images de Juifs en prière et du vieil homme qui se retourne pour fixer Solal, avant que celui-ci ne rebrousse chemin, n’est pas malvenue. [...]
Mais à côté de ces petits bonheurs, que de mauvais choix ! Mauvais choix, cette voix off de Solal dès le début (alors même que le personnage est censé se suicider à la fin du film). Désastreuse, la manière dont Bonder transpose la scène inaugurale du roman (l’offre d’amour de Solal déguisé en vieillard juif). Je crois que le spectateur non prévenu ne peut strictement rien comprendre à cette scène grotesque. Il est vrai que l’adaptation d’un tel épisode est une gageure, mais là, ce n’est plus une adaptation, c’est un attentat.  [...]

- Glenio Bonder apporte-t-il selon vous son univers propre à celui du livre ?


Si vous voulez parler de l’univers de la publicité, assurément. Le choix des séquences courtes, quelques arrêts sur images extrêmement kitsch, quelques initiatives racoleuses (Jack Lang et Georges Kiejman en figurants !), et de très beaux paysages italiens, qui peuvent en tout cas donner des idées de destination de voyage aux spectateurs. Et puis, le politiquement correct. La scène à l’opéra où, avant même de se connaître, Ariane et Solal se retrouvent seuls contre tous à soutenir une danseuse victime d’injures antisémites, n’a tout simplement aucune justification. [...]
Le comble du mauvais goût est cette séance d’actualités cinématographiques où Solal demande à Ariane de le masturber pendant les discours de Mussolini et d’Hitler. Solal jouissant en quelque sorte à la face du Führer : "kolossale" finesse assurément ! Serait-ce cela, la Bonder’s touch ?
Lien vers l'article intégral sur myboox.fr


La critique de Marie-Elisabeth Rouchy (CinéObs)


Quarante-cinq ans après la publication du livre d’Albert Cohen et après plusieurs annonces d’adaptations restées sans suite, « Belle du seigneur » arrive à l’écran. Le diplomate et réalisateur brésilien Glenio Bonder a consacré plus d’une trentaine d’années au projet, emportant, dès 1993, l’adhésion de Bella Cohen, la veuve de l’écrivain, mais peinant dès lors à trouver un financement. Son scénario est habile – il a pris le parti de recentrer l’intrigue sur la seule période de la montée du nazisme, assimilant ainsi le caractère morbide de la relation amoureuse qui lie Solal à Ariane au contexte politique et à l’incompétence de la SDN. La mise en scène est moins heureuse. Gravement malade au moment du tournage, le réalisateur n’a pu en achever le montage, donnant davantage à son film valeur de témoignage que de véritable œuvre.
 


La critique de Sandrine Marquès (Le Monde)


Réputé inadaptable, le chef-d'œuvre littéraire d'Albert Cohen, Belle du Seigneur, fait pourtant aujourd'hui l'objet d'une transposition au cinéma. Condensés en moins de deux heures de récit, les cent six chapitres qui composent cette passion fleuve située dans les années 30, alimentent un film purement illustratif.

Le résultat est d'autant plus malheureux que le réalisateur Glenio Bonder, décédé prématurément en 2011, a consacré sa vie au roman de Cohen qu'il a découvert dans les années 80. Ancien ambassadeur du Brésil aux Etats-Unis, il s'est d'autant plus identifié au livre que l'histoire se déroule dans le monde de la diplomatie, à la Société des Nations de Genève (qui fut l'ancêtre de l'ONU).

Mais de l'épopée foisonnante et lyrique, imaginée par Cohen, Bondere tire qu'une fiction transparente. Peu inspiré, le réalisateur a choisi de se concentrer sur les amours tourmentées des amants "sublimes" (comme Cohen les appelait lui-même), Ariane et Solal. Mariée à un diplomate falot, Ariane succombe au charme de Solal, un séducteur notoire qui se laisse emporter par le vertige des sentiments. Le couple adultérin [sic] va s'anéantir dans la passion.

UNE MISE EN SCÈNE DE PAPIER GLACÉ

Incapable de restituer le tragique de cette relation destructrice et de lui donner simplement corps, Glenio Bonder aligne une série de poncifs qu'accentue une mise en scène de papier glacé. Interprété par deux acteurs-mannequins à la beauté fulgurante mais à la capacité d'interprétation limitée (Natalia Vodianova et Jonathan Rhys Meyers), le film accumule les clichés autour du drame sentimental. C'est une amante délaissée qui pleure dans des draps joliment froissés, un mari jaloux délaissé sans charme ni charisme, un amant fougueux et dangereux.

Certes, le film se dit librement adapté de l'œuvre littéraire d'origine mais son esthétique de magazine féminin haut de gamme le dépareille [sic] de la moindre profondeur. Le personnage de Solal se dit "hanté" par sa maîtresse. Le film ne peut en dire autant, lesté par la vacuité de ses artifices.



La critique de Corinne Renou-Nativel (La Croix)

Librement inspiré de l’œuvre d’Albert Cohen, ce film, qui multiplie les effets, risque fort de ne pas contenter ses lecteurs.

BELLE DU SEIGNEUR*, de Glenio Bonder (France, 1h44)

En 1936, Solal des Solal officie à la Société des Nations où il tente de sensibiliser les uns et les autres au danger de la montée du nazisme et du fascisme. Séducteur aimant davantage courir qu’atteindre son but, toujours trop facile, il s’éprend de la belle Ariane, l’épouse d’un de ses subordonnées, Adrien. Au couple, sans nommer quiconque, il annonce qu’il séduira sous peu une femme mariée. Adrien l’admire. Ariane se montre dubitative – avant de succomber.

Solal quitte Genève et la SDN où il se désespère d’obtenir une véritable écoute, et emmène Ariane vivre au loin leur folle passion. Mais l’aimée, qui incarnait la pureté à ses yeux, a perdu de son éclat dès qu’elle lui a cédé. Dans un palais somptueux, chacun, prisonnier du jeu des apparences, refuse de se montrer à l’autre dans les gestes du quotidien. Leur amour fusionnel se révèle destructeur.

Pendant 25 ans, Glenio Bonder, diplomate brésilien devenu réalisateur, a rêvé d’adapter à l’écran le chef-d’œuvre d’Albert Cohen, en se concentrant sur la passion de Solal et Ariane. Il lui a fallu une détermination exceptionnelle pour surmonter toutes les difficultés et débuter enfin le tournage en novembre 2010. Mais un an plus tard, le long-métrage tout juste achevé, Glenio Bonder est mort à 55 ans d’une maladie rare du sang.

Film d’une vie réalisé dans l’urgence, Belle du Seigneur possède un souffle indéniable. Mais son esthétique de papier glacé peut séduire aussi bien que déplaire.

Surtout, on éprouve quelque difficulté à s’attacher à ses héros. Solal, tourmenté volontiers ombrageux et odieux, est incarné avec conviction par Jonathan Rhys Meyers. Ariane étouffe toute singularité pour se muer en « belle du seigneur » jusqu’à devenir insipide ; elle est interprétée par Natalia Volodianova, mannequin très en vogue, mais comédienne débutante au jeu limité.

En délégués français à la SDN, Jack Lang et Georges Kiejman font une surprenante apparition à la lisière du saugrenu. La musique de Gabriel Yared, omniprésente, semble trop souvent redondante avec le récit. Les aficionados du chef-d’œuvre d’Albert Cohen ont sans doute tout intérêt à retourner aux pages de ce roman réputé inadaptable.


Réaction de Mme Anne-Carine Jacoby, représentante des ayant droit (dans "Fallait-il adapter Belle du Seigneur", Télérama n° 3311, p. 14) :

"C'est une catastrophe. Nous n'avons pas reçu le texte final de l'adaptation, pas été consultés sur le choix des interprètes, qui jouent atrocement mal. On voit même Jack Lang et Georges Kiejman en guest stars ! Ce film est plein d'incohérences et ridiculise ce magnifique roman. Et nous n'avons rien pu faire contre cela, car Bella Cohen avait donné à Glenio Bonder les pleins pouvoirs. Elle arrivait au bout de sa vie, elle était fatiguée, elle s'était entichée de ce personnage brésilien haut en couleur, passionné par Belle du seigneur. La seule chose que nous avons pu obtenir, c'est que la mention adapté de soit remplacée par librement adapté de"

Mise à jour le Vendredi, 28 Juin 2013 17:20
 

Belle du Seigneur au cinéma, sortie le 19 juin.

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La bande annonce :


http://cinema.nouvelobs.com/articles/24921-bandes-annonces-video-natalia-vodianova-dans-belle-du-seigneur-avec-jonathan-rhys-meyers


La page sur le film d'Allociné.fr 


Le film d'une vie

Secret de tournage sur Belle du seigneur

Belle du Seigneur est le film d'une vie, celle de son réalisateur Glenio Bonder. Son histoire d'amour avec le roman d'Albert Cohen commence au milieu des années 1980, alors qu'il est diplomate pour le gouvernement brésilien. Adapter l'oeuvre de Cohen au cinéma est rapidement devenu une obsession pour celui qui a déjà réalisé des courts métrages, des documentaires et des publicités pour de grandes marques (Calvin Klein, etc.). Glenio Bonder écrit alors un scénario de 120 pages, mais des difficultés ne tardent pas à apparaitre : l'acquisition des droits et la recherche de financement piétine, poussant ainsi le cinéaste à attendre jusqu'en 2010 pour débuter le tournage. Atteint d'une maladie du sang, Bonder doit subir une greffe de moelle osseuse. Pourtant, il n'arrête pas son projet. En 2011, le film entre en post-production. Le metteur en scène, fatigué, est hospitalisé pour se faire opérer. Le 10 novembre de la même année, il décède à l'âge de 55 ans, et ne verra pas la version finale du film qui lui a demandé près de vingt-cinq années d'efforts.

L'oeuvre d'Albert Cohen

Secret de tournage sur Belle du seigneur

Belle du Seigneur est avant tout une oeuvre majeure de la littérature française. 845 pages sorties de l'imagination d'Albert Cohen. Le livre a reçu en 1968 le Grand Prix de l'Académie française. Traduit dans 13 langues, il s'est vendu à plus d'un million d'exemplaires.

Droits d'adaptation, ce calvaire

Secret de tournage sur Belle du seigneur

Obtenir les droits d'adaptation de Belle du Seigneur a été un véritable casse-tête pour Glenio Bonder. Il a découvert que les droits appartenaient à des producteurs de cinéma, les frères Hakim, qui avaient déjà un projet de film, lequel n'a finalement pas abouti. Le cinéaste a ainsi envoyé son scénario à Bella Cohen, détenant les droits de son mari Albert. Après quelques réflexions, la veuve s'est montrée intéressée, et a demandé à Bonder de faire des recherches sur l'enfance de son mari. En 1994, dans le cadre de la collection "Un siècle d'écrivains", France 3 projette de diffuser un documentaire sur Albert Cohen. Une aubaine pour Bonder, qui peut enfin réaliser le portrait de son idole littéraire. Un portrait salué par la critique. 

Les frères Hakim décédés, les négociations reprennent avec Gallimard, éditeur de "Belle du Seigneur". Soutenu par Bella Cohen, le réalisateur acquiert les droits d'adaptation en 1999. Le contrat avec la maison d'édition précise cependant que le premier jour de tournage doit avoir lieu avant la fin de l'année 2006. L'équipe du film y parvient malgré de nombreux problèmes de production. Entre temps, Bella Cohen décède. En 2009, le tournage n'est toujours pas terminé, mais devant la persévérance de Bonder et son équipe, Gallimard donne son feu vert pour la prolongation des droits. Le film s'achève définitivement en janvier 2012.

Le financement

Secret de tournage sur Belle du seigneur

La production a été aussi compliquée à mettre en place que l'obtention des droits d'adaptation. Après l'acquisition des droits par BDS, la société de Glenio Bonder, la recherche de financements a pu commencer. Entre les producteurs qui n'ont pas osé adapter une oeuvre qu'ils estimaient inadaptable et ceux qui ont accepté à condition de choisir le réalisateur (alors que le contrat de cession de droits stipulait que seul Glenio Bonder pouvait réaliser le film), il a fallu faire vite pour éviter que le projet tombe à l'eau. L'espérance est venue du producteur Thierry de Navacelle à la tête de TNVO. Mais les financements ajoutés n'ont pas suffi. En janvier 2010, la société de production luxembourgeoise DELUX (dirigée par Jimmy de Brabant) et la compagnie belge Banana Films ont accepté de prêter main forte et de coproduire le film. L'apport d'investisseurs privés a ensuite fait en sorte que le projet aboutisse.

De "Harry Potter" à "Belle du Seigneur"

Secret de tournage sur Belle du seigneur

Lorsque Glenio Bonder a contacté Eduardo Serra pour devenir directeur de la photographie de Belle du Seigneur, celui-ci travaillait encore à Londres sur les deux derniers volets de la saga Harry Potter. Il est ainsi passé d'une atmosphère "gothique, mystérieuse et dure" à une esthétique "entre réalisme et poésie", selon les mots de Glenio Bonder.

Retrouvailles

Secret de tournage sur Belle du seigneur

Belle du Seigneur marque les retrouvailles entre Jonathan Rhys Meyers et Eduardo Serra, directeur de la photographie, après The Disappearance of Finbar (1995) réalisé par Sue Clayton.

Bande Originale

Secret de tournage sur Belle du seigneur

Gabriel Yared, qui a composé la musique de Belle du Seigneur, a commencé à travailler sur le projet comme à son habitude, c'est-à-dire sans aucune image. Il évoque ses difficultés sur ce film : "La musique originale de Belle du Seigneur ne ressemble à rien de ce que j'ai fait auparavant. Elle ne sourit jamais, elle est ténébreuse, ne se "lâche" pas. C'est un mélange de tension et de pudeur qui ne coulait pas de source pour moi."

Natalia Vodianova, la tête d'affiche

Secret de tournage sur Belle du seigneur

Natalia Vodianova s'est vu confier le rôle d'Ariane dans Belle du Seigneur, le personnage principal féminin. Une première pour la jeune actrice qui a auparavant fait quelques apparitions sur grand écran, notamment dans CQ deRoman Coppola ou encore Le Choc des Titans de Louis Leterrier"Pour Belle du Seigneur, j’ai pris une douzaine de leçons avec un coach avec lequel j’ai répété les scènes les plus intenses et analysé le personnage d’Ariane. C’est comme si nous avions fait une thérapie express avec elle."

Casting

Secret de tournage sur Belle du seigneur

Natalia Vodianova était une amie de la compagne de Glenio Bonder. Le cinéaste lui a alors avoué qu'il avait déjà pensé à elle pour le rôle-titre : "J'ai tout d’abord été assez réticente, je trouvais cela compliqué notamment à cause de mon amitié avec sa petite amie. Mais Glenio a persévéré. Il m’a envoyé le scénario et l’histoire d’Ariane et Solal m’a touchée", se souvient la comédienne.

Relation (très) professionnelle

Secret de tournage sur Belle du seigneur

Natalia Vodianova et Jonathan Rhys Meyers, qui interprètent respectivement Ariane et Solal, les deux amants deBelle du Seigneur, ont eu une relation assez inhabituelle sur un plateau de tournage : "Nous ne nous rencontrions que pendant les prises, sans se voir ni se parler avant. Du coup, notre première rencontre a été intense et imprévisible, à l’image de ce que vivaient nos personnages. J’étais convaincue que discuter ou devenir amie avec Jonathan nuirait au potentiel dramatique de l’histoire. Nous avons pris le temps de nous découvrir après la fin du tournage", raconte l'actrice. "Étant donné le temps très court dont nous disposions pour le tournage, Jonathan et moi étions obligés de rester très spontanés. Quand on n’a que deux prises pour réussir, on doit se faire confiance, on n’a pas le temps de douter ou d’être incertains", poursuit-elle.

Une aide précieuse

Secret de tournage sur Belle du seigneur

Avec les problèmes liés à la production, Glenio Bonder a dû apporter nombre de changements à son scénario d'origine. De fait, il a contacté l'un de ses confrères en Italie : Vincenzo Cerami, scénariste de renom, reconnu pas ses pairs pour avoir notamment écrit en compagnie de Roberto Benigni l'émouvant La vie est Belle.

Mise à jour le Dimanche, 16 Juin 2013 08:13
 

VISAGES D'ALBERT COHEN - une nouvelle édition, revue et augmentée, des Cahiers Albert Cohen n°13

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AVANT-PROPOS
à la réédition du cahier n°13

Deux raisons justifient la réédition de ce Cahier n°13.

La première tient à notre volonté de pérenniser notre collection. Comme le savent nos plus anciens lecteurs, les quatorze premiers numéros des Cahiers ont été autoédités avec les moyens du bord et distribués tant bien que mal, grâce au dévouement de quelques membres, en particulier Michèle Laury et Daisy Politis. Cette période pionnière s’est achevée en 2005, avec le numéro 15, quand les éditions du Manuscrit ont accepté de reprendre la collection, assurant enfin aux travaux de l’Atelier Albert Cohen des conditions d’impression, de visibilité et de distribution dignes et durables.

Avec le temps, cependant, les numéros antérieurs à notre collaboration avec Le Manuscrit se sont raréfiés ; beaucoup sont devenus introuvables, ce qui est d’autant plus regrettable que leur qualité scientifique n’a rien à envier à celle des numéros ultérieurs. Il fallait absolument trouver des solutions à cette coupure entre les deux « âges » des Cahiers Albert Cohen. La publication en ligne en est une, rendue possible par le travail de Baptiste Bohet sur le site récemment rénové de l’Atelier. Mais, parce que nous croyons encore à l’avenir de l’imprimé, cette première solution ne nous a pas semblé incompatible avec la réédition raisonnée des anciens numéros des Cahiers, en accord avec Le Manuscrit et avec l’aide précieuse du Centre National du Livre. Nous l’avons fait pour le numéro 8, consacré aux trente ans de Belle du Seigneur. Nous le faisons cette année avec le numéro 13, conçu en hommage à Denise Rachel Goitein-Galpérin.

Nul hasard n’a présidé à ce choix. Lorsque nous avions décidé, en 2003, de lui offrir ce volume d’hommages, nous étions plusieurs à savoir que Denise Goitein-Galpérin avait déjà commencé à s’éloigner, atteinte par les premiers symptômes de la maladie qui, en quelques années, allait ravager cette belle intelligence. Il y avait urgence : c’étaient sans doute les derniers mois au cours desquels il lui serait possible de lire ce volume que nous voulions lui offrir. Denise Goitein-Galpérin nous a définitivement quittés le 21 décembre 2010, nous laissant tous un peu orphelins. Le Cahier d’hommages en devenait plus actuel que jamais : il fallait de toute nécessité le republier.

Triste ironie, qui n’aurait pas échappé à celle qui nous avait gratifiés, naguère, d’une belle étude sur les traces de la « Danse Macabre » de Baudelaire dans Belle du Seigneur : entre 2003 – année de la première parution de ce recueil – et aujourd'hui, où nous le rééditons, deux des contributeurs se sont ajoutés à la liste de nos chers disparus : Norman-David Thau et Judith Kauffmann. Qu’ils soient ici associés à sa mémoire.



Mise à jour le Lundi, 27 Mai 2013 14:41 Lire la suite...
 


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