ATELIER ALBERT COHEN

Groupe de recherches universitaires sur Albert Cohen

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Bienvenue sur le site de l'atelier Albert Cohen

Solal, un cri d'amour

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Image de l'Affiche de la pièce

 Solal, un cri d’amour, extraits de Belle du Seigneur d’Albert Cohen
le 13 novembre à 21h00 au Théâtre de la Vieille Grille (Paris).

La Compagnie Lunâme met en lumière

un aspect de Belle du Seigneur jusque là ignoré au théâtre...


Fils du grand rabbin de l’île grecque de Céphalonie, Solal s’est détourné des siens pour mener une vie d’aventures amoureuses et de réussite sociale, qui le mène à devenir le sous-secrétaire général de la Société des Nations, à Genève. En mission dans le Berlin de 1935, la haine antisémite le ramène violemment à sa judéité et, en un acte extrême, il décide de l’arborer publiquement. Il erre dans les rues berlinoises en tenue de prière, jusqu’à se faire lyncher par des nazis qui lui entaillent des croix gammées sur la poitrine. Solal est alors recueilli par les Silberstein, une famille juive qui, lasse des persécutions présentes et en en prévoyant l’aggravation, s’est enfouie pour habiter secrètement les caves de leur magasin d’antiquités. Il y rencontre Rachel, jeune femme belle et difforme, dont l’imaginaire oscille entre ses rêves de mariage et ses lubies morbides...




Mise à jour le Dimanche, 13 Octobre 2013 18:47
 

Alain Schaffner, le grandiose et le dérisoire

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Image couverture : Le grandiose et le dérisoire Va paraître en novembre :

Alain Schaffner

Albert Cohen, le grandiose et le dérisoire

 

Albert Cohen, romancier, mais aussi poète, dramaturge et autobiographe, n’est pas seulement  la voix du peuple juif dans la littérature française. C’est aussi un grand satiriste, un romancier de la passion, un explorateur des écritures du moi, un inventeur de formes et un styliste hors pair, usant magistralement de toutes les formes de l’oralité. Son œuvre baroque est pleine de jeux de miroirs, de renversements, de mises en abyme, et d’excès comiques ou tragiques.

La tension qui s’y établit entre le grandiose et le dérisoire résume la manière dont se tisse dans l’oeuvre le lien entre éthique et esthétique : d’un côté une morale athée de la compassion, de la « tendresse de pitié », un intérêt porté aux obscurs, aux sans-grade; de l’autre une esthétique du contrepoint, une polyphonie flamboyante, un appel à vivre avec intensité.


http://www.editionszoe.ch/livre/albert-cohen-le-grandiose-et-le-derisoire

 

Joël Dicker lecteur d'Albert Cohen

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Joël Dicker marqué par le roman d'Albert Cohen : Belle du Seigneur

Source : RTL


Le prix Goncourt des lycéens et lauréat du Grand prix du roman de l'Académie française, Joël Dicker ( "La vérité sur l'affaire Harry Québert") se souvient d'un roman d'Albert Cohen : "Belle du Seigneur".

Joël Dickera été couronné cette année du Goncourt des lycéens et du Grand prix du roman de l'Académie française, pour son roman La vérité sur l'affaire Harry Québert. Le jeune prodige originaire de Genève se souvient d'une lecture marquante d'un écrivain de chez lui : Albert Cohen.

Mise à jour le Dimanche, 04 Août 2013 11:06 Lire la suite...
 

Actualité - Journée d'étude 2013 en video

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Notre dernière journée d'étude

" La géographie imaginaire d'Albert Cohen "

est dorénavant accessible en vidéo.




Mise à jour le Mardi, 25 Juin 2013 16:45
 

Critiques du film Belle du Seigneur de Glenio Bonder

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Premières critiques du film Belle du Seigneur de Glenio Bonder


Une interview de Philippe Zard sur le site myboox.fr


Interrogé par la journaliste Lauren Malka (myboox.fr), Philippe Zard a exprimé ses inquiétudes avant le film ; recontacté après avoir vu le film, il a exposé ses profondes réserves sur la réalisation de Glenio Bonder.

Extraits :


"Même envisagé pour lui-même, en faisant abstraction du roman, ce film reste un exercice artificiel, qui glisse sans laisser en vous aucune empreinte émotionnelle. Quelques passages réussis, certes, mais beaucoup d’ennui, et le sentiment consternant d’une œuvre superflue. J’ai beau essayer de me concentrer sur ce qui se passe à l’écran, je ne vois que des silhouettes qui gesticulent sans rime ni raison, auxquelles il m’est impossible de m’attacher ou même de m’intéresser sérieusement. En art, l’absence d’émotion est un péché capital.
À vrai dire, ce n’est même pas un navet, ce n’est même pas une catastrophe, c’est simplement un film qu’on oublie presque aussitôt qu’on l’a vu – c'est-à-dire tout le contraire du roman."
[...]
Bonder a surtout eu de la peine à sacrifier quoi que ce soit, il a tenu à mettre "un peu de tout" : un peu d’Adrien, un peu de Mariette, un peu des Deume, un peu de Berlin, un peu de SDN, etc. Seuls les Valeureux et Rachel passent entièrement à la trappe (heureusement, en un sens, qu’ils ne sont pas mêlés à ce ratage). Mais en mettant "un peu de tout", on ne fait pas un film, on ne fait rien : une succession de scènes qui, presque systématiquement, crèvent comme des bulles éphémères à la surface de l’eau.
[...]
Dans ce film, encore une fois, on ne va jamais jusqu’au bout : ni jusqu’au bout de la sensualité, ni jusqu’au bout de la passion, ni jusqu’au bout de la satire, ni jusqu’au bout de la cruauté…
[...]
Quelques secondes de grâce parfois, dans la manière de filmer l’actrice devant son miroir ou quelques minutes de tendresse et de vulnérabilité dans le couple. La scène de la synagogue de Berlin, avec ces images de Juifs en prière et du vieil homme qui se retourne pour fixer Solal, avant que celui-ci ne rebrousse chemin, n’est pas malvenue. [...]
Mais à côté de ces petits bonheurs, que de mauvais choix ! Mauvais choix, cette voix off de Solal dès le début (alors même que le personnage est censé se suicider à la fin du film). Désastreuse, la manière dont Bonder transpose la scène inaugurale du roman (l’offre d’amour de Solal déguisé en vieillard juif). Je crois que le spectateur non prévenu ne peut strictement rien comprendre à cette scène grotesque. Il est vrai que l’adaptation d’un tel épisode est une gageure, mais là, ce n’est plus une adaptation, c’est un attentat.  [...]

- Glenio Bonder apporte-t-il selon vous son univers propre à celui du livre ?


Si vous voulez parler de l’univers de la publicité, assurément. Le choix des séquences courtes, quelques arrêts sur images extrêmement kitsch, quelques initiatives racoleuses (Jack Lang et Georges Kiejman en figurants !), et de très beaux paysages italiens, qui peuvent en tout cas donner des idées de destination de voyage aux spectateurs. Et puis, le politiquement correct. La scène à l’opéra où, avant même de se connaître, Ariane et Solal se retrouvent seuls contre tous à soutenir une danseuse victime d’injures antisémites, n’a tout simplement aucune justification. [...]
Le comble du mauvais goût est cette séance d’actualités cinématographiques où Solal demande à Ariane de le masturber pendant les discours de Mussolini et d’Hitler. Solal jouissant en quelque sorte à la face du Führer : "kolossale" finesse assurément ! Serait-ce cela, la Bonder’s touch ?
Lien vers l'article intégral sur myboox.fr


La critique de Marie-Elisabeth Rouchy (CinéObs)


Quarante-cinq ans après la publication du livre d’Albert Cohen et après plusieurs annonces d’adaptations restées sans suite, « Belle du seigneur » arrive à l’écran. Le diplomate et réalisateur brésilien Glenio Bonder a consacré plus d’une trentaine d’années au projet, emportant, dès 1993, l’adhésion de Bella Cohen, la veuve de l’écrivain, mais peinant dès lors à trouver un financement. Son scénario est habile – il a pris le parti de recentrer l’intrigue sur la seule période de la montée du nazisme, assimilant ainsi le caractère morbide de la relation amoureuse qui lie Solal à Ariane au contexte politique et à l’incompétence de la SDN. La mise en scène est moins heureuse. Gravement malade au moment du tournage, le réalisateur n’a pu en achever le montage, donnant davantage à son film valeur de témoignage que de véritable œuvre.
 


La critique de Sandrine Marquès (Le Monde)


Réputé inadaptable, le chef-d'œuvre littéraire d'Albert Cohen, Belle du Seigneur, fait pourtant aujourd'hui l'objet d'une transposition au cinéma. Condensés en moins de deux heures de récit, les cent six chapitres qui composent cette passion fleuve située dans les années 30, alimentent un film purement illustratif.

Le résultat est d'autant plus malheureux que le réalisateur Glenio Bonder, décédé prématurément en 2011, a consacré sa vie au roman de Cohen qu'il a découvert dans les années 80. Ancien ambassadeur du Brésil aux Etats-Unis, il s'est d'autant plus identifié au livre que l'histoire se déroule dans le monde de la diplomatie, à la Société des Nations de Genève (qui fut l'ancêtre de l'ONU).

Mais de l'épopée foisonnante et lyrique, imaginée par Cohen, Bondere tire qu'une fiction transparente. Peu inspiré, le réalisateur a choisi de se concentrer sur les amours tourmentées des amants "sublimes" (comme Cohen les appelait lui-même), Ariane et Solal. Mariée à un diplomate falot, Ariane succombe au charme de Solal, un séducteur notoire qui se laisse emporter par le vertige des sentiments. Le couple adultérin [sic] va s'anéantir dans la passion.

UNE MISE EN SCÈNE DE PAPIER GLACÉ

Incapable de restituer le tragique de cette relation destructrice et de lui donner simplement corps, Glenio Bonder aligne une série de poncifs qu'accentue une mise en scène de papier glacé. Interprété par deux acteurs-mannequins à la beauté fulgurante mais à la capacité d'interprétation limitée (Natalia Vodianova et Jonathan Rhys Meyers), le film accumule les clichés autour du drame sentimental. C'est une amante délaissée qui pleure dans des draps joliment froissés, un mari jaloux délaissé sans charme ni charisme, un amant fougueux et dangereux.

Certes, le film se dit librement adapté de l'œuvre littéraire d'origine mais son esthétique de magazine féminin haut de gamme le dépareille [sic] de la moindre profondeur. Le personnage de Solal se dit "hanté" par sa maîtresse. Le film ne peut en dire autant, lesté par la vacuité de ses artifices.



La critique de Corinne Renou-Nativel (La Croix)

Librement inspiré de l’œuvre d’Albert Cohen, ce film, qui multiplie les effets, risque fort de ne pas contenter ses lecteurs.

BELLE DU SEIGNEUR*, de Glenio Bonder (France, 1h44)

En 1936, Solal des Solal officie à la Société des Nations où il tente de sensibiliser les uns et les autres au danger de la montée du nazisme et du fascisme. Séducteur aimant davantage courir qu’atteindre son but, toujours trop facile, il s’éprend de la belle Ariane, l’épouse d’un de ses subordonnées, Adrien. Au couple, sans nommer quiconque, il annonce qu’il séduira sous peu une femme mariée. Adrien l’admire. Ariane se montre dubitative – avant de succomber.

Solal quitte Genève et la SDN où il se désespère d’obtenir une véritable écoute, et emmène Ariane vivre au loin leur folle passion. Mais l’aimée, qui incarnait la pureté à ses yeux, a perdu de son éclat dès qu’elle lui a cédé. Dans un palais somptueux, chacun, prisonnier du jeu des apparences, refuse de se montrer à l’autre dans les gestes du quotidien. Leur amour fusionnel se révèle destructeur.

Pendant 25 ans, Glenio Bonder, diplomate brésilien devenu réalisateur, a rêvé d’adapter à l’écran le chef-d’œuvre d’Albert Cohen, en se concentrant sur la passion de Solal et Ariane. Il lui a fallu une détermination exceptionnelle pour surmonter toutes les difficultés et débuter enfin le tournage en novembre 2010. Mais un an plus tard, le long-métrage tout juste achevé, Glenio Bonder est mort à 55 ans d’une maladie rare du sang.

Film d’une vie réalisé dans l’urgence, Belle du Seigneur possède un souffle indéniable. Mais son esthétique de papier glacé peut séduire aussi bien que déplaire.

Surtout, on éprouve quelque difficulté à s’attacher à ses héros. Solal, tourmenté volontiers ombrageux et odieux, est incarné avec conviction par Jonathan Rhys Meyers. Ariane étouffe toute singularité pour se muer en « belle du seigneur » jusqu’à devenir insipide ; elle est interprétée par Natalia Volodianova, mannequin très en vogue, mais comédienne débutante au jeu limité.

En délégués français à la SDN, Jack Lang et Georges Kiejman font une surprenante apparition à la lisière du saugrenu. La musique de Gabriel Yared, omniprésente, semble trop souvent redondante avec le récit. Les aficionados du chef-d’œuvre d’Albert Cohen ont sans doute tout intérêt à retourner aux pages de ce roman réputé inadaptable.


Réaction de Mme Anne-Carine Jacoby, représentante des ayant droit (dans "Fallait-il adapter Belle du Seigneur", Télérama n° 3311, p. 14) :

"C'est une catastrophe. Nous n'avons pas reçu le texte final de l'adaptation, pas été consultés sur le choix des interprètes, qui jouent atrocement mal. On voit même Jack Lang et Georges Kiejman en guest stars ! Ce film est plein d'incohérences et ridiculise ce magnifique roman. Et nous n'avons rien pu faire contre cela, car Bella Cohen avait donné à Glenio Bonder les pleins pouvoirs. Elle arrivait au bout de sa vie, elle était fatiguée, elle s'était entichée de ce personnage brésilien haut en couleur, passionné par Belle du seigneur. La seule chose que nous avons pu obtenir, c'est que la mention adapté de soit remplacée par librement adapté de"

Mise à jour le Vendredi, 28 Juin 2013 17:20
 

Le Parent pauvre. Albert Cohen, le Québec et la littérature, par Mathieu Bélisle

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Le parent pauvre

Albert Cohen, le Québec et la littérature

Les romans d’Albert Cohen racontent les aventures de Solal, un Juif ambitieux qui choisit à un jeune âge de quitter le ghetto où il a grandi sur la petite île grecque de Céphalonie pour trouver refuge en France où il se lance à la conquête du pouvoir. Fils de la branche aînée des Solal, la famille la plus riche (en réalité : la moins pauvre) du ghetto, le jeune Solal fait penser aux grands héros romanesques du XIXe siècle, les Rastignac, Julien Sorel et Bel-Ami qui rêvent de gloire et de richesse et qui arrivent par les femmes. Grâce à sa liaison avec une riche veuve, à son charme et à son intelligence remarqués, il gravit à une vitesse fulgurante les échelons de la société française. Il devient le secrétaire d’un sénateur influent, dont il poursuit de ses avances la fille – qu’il ravira romanesquement à son fiancé en l’enlevant à cheval le jour de son mariage – dans le but de faire pression sur le père afin qu’il favorise son avancement. Par une série de manoeuvres habiles et de coups de force, Solal s’impose sur l’échiquier politique et se porte candidat sous la bannière socialiste. Il devient à vingt-cinq ans le plus jeune député de France et se voit offrir par le président Lebrun le ministère du Travail dans un gouvernement de coalition. Cette ascension au sein d’un parti résolument campé à gauche lui permet, ironie du sort, d’assurer son aisance matérielle et de confirmer son nouveau statut : il quitte un quartier populaire parisien pour s’installer avec sa nouvelle épouse à l’écart de la ville, dans « La Commanderie », un vieux château du XVIe siècle qu’il entreprend de rénover. « J’aime l’humanité et beaucoup beaucoup d’argent », résume-t-il, à la fois par esprit de défi et pour répondre à ceux qui voient une contradiction entre ses convictions politiques et son goût pour le luxe.

Mise à jour le Samedi, 22 Juin 2013 22:25 Lire la suite...
 

Présentation de Belle du Seigneur dans le Hors-Série du Nouvel Observateur

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BELLE DU SEIGNEUR dans le Nouvel Observateur : un article de Philippe Zard


Cohen est l’homme d’un seul livre et ce n’est pas Belle du Seigneur, mais une tétralogie qui a failli s’appeler Solal et les Solal ou La Geste des Juifs. Belle du Seigneur n’est que le couronnement de ce roman sans nom que les aléas de l’histoire et de l’édition ont dispersé sur près de quarante ans. Notre perspective s’en trouve irrémédiablement faussée. Dans son splendide isolement en Pléiade, le volume nous parvient amputé de son socle inaugural (le coruscant Solal) et de ses indispensables volets judéo-burlesques (Mangeclous, Les Valeureux).


Certes l’œuvre est si énorme qu’elle semble se suffire à elle-même : testamentaire (les textes ultérieurs n’en seront que des apostilles), gorgée de morceaux de bravoure (dont la plus belle scène de séduction du siècle), nimbée de ce titre étrange qu’on croirait volé au Cantique des cantiques, elle a cette vertu rare de changer à jamais le regard de ceux qui s’y sont laissé prendre.


Solal et Ariane ont depuis longtemps rejoint le ciel des amants mythiques. Pourtant, Belle du Seigneur, plus qu’un « roman d’amour », est un roman de l’Amour. Entendons : la mise à l’épreuve de ce mot équivoque dont l’Occident romain (c'est-à-dire grec et chrétien) a fait son horizon… Solal se trouve au centre névralgique et névrotique de cette enquête. Juif, il se fantasme sauveur et porteur de la « Loi », il a le tourment de l’origine et l’angoisse des parvenus, mais aussi cette âme sismographique des parias qui sentent venir de loin les catastrophes. Dans le volet inaugural (Solal, 1930), conscience déchirée, il n’avait à affronter que des conflits d’allégeance entre les mœurs de la tribu et les sirènes occidentales. Dans Belle du Seigneur, le destin de l’Europe se greffe à l’aventure amoureuse : avatar de Joseph, Solal est le très haut fonctionnaire d’une institution vouée au rêve de paix universelle (la SDN) ; croisement imprévisible de David, de Tristan et de Don Juan, il est aussi l’amant d’Ariane, sommée, à son corps défendant, d’être la « première humaine ».

Mythes érotique et politique se fracassent de concert. Les misères de l’amour font écho aux turpitudes des Nations, le mensonge de la « passion » à la mystification politique – autant de masques d’une « adoration de la force » dont Solal se complaît à traquer les symptômes dans les manèges animaux de la séduction et le culte fasciste de la « virilité bottée ». Le point de fuite de ces deux lignes est l’un des épisodes les moins compris du roman : les noces carnavalesques de Solal avec une naine juive dans une cave du Berlin nazi où incube le Génocide. De retour d’Allemagne, le diplomate entreprend vainement d’alerter les puissances sur le sort de ses frères persécutés : la chute politique qui s’ensuivra, tenue secrète à Ariane, précipitera sa débâcle sentimentale.


Jamais pourtant ces rimes entre petite et grande Histoire, partout présentes, mais masquées, n’écrasent les logiques singulières. La générosité torrentielle du roman-fleuve donne vie et voix à chacun : à Ariane, dans son bain, ses débats, ses ébats, ses ablutions et dévotions, dans sa lutte pour soustraire son pauvre bonheur aux fureurs savonaroliennes de son amant ; à Adrien, minus habens transfiguré par le malheur en cocu pathétique ; au chœur des Valeureux et aux cuirs de Mariette, désopilants témoins des vanités mondaines ; à l’écrivain lui-même qui, de satires vachardes en litanies lyriques, s’arroge toutes les libertés sans entraver la nôtre.
Dans la profusion du verbe et l’irréductible humour s’épanche une fraternité qui survit à la dévastation des illusions. L’amour même résiste, on ne sait comment, à son traitement abrasif. Parce que rien de ce qui est humain ne lui est étranger, cette symphonie crépusculaire demeure une paradoxale leçon de vie.


Philippe ZARD

© Le Nouvel Observateur ("les Chefs-d'oeuvre de la littérature", Hors-série n° 83 juin/juillet 2013).

Le titre et les sous-titres, n'étant pas de l'auteur mais de la rédaction du journal, n'ont pas été reproduits.


Mise à jour le Vendredi, 21 Juin 2013 11:56 Lire la suite...
 

Carole Auroy commente Belle du Seigneur sur France-Culture

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CAROLE AUROY COMMENTE BELLE DU SEIGNEUR sur FRANCE-CULTURE


Dans Les Nouveaux chemins de la connaissance, sur France-Culture, Carole Auroy commente Belle du Seigneur au micro d'Adèle Van Reeth

L'émission peut être écoutée et podcastée. 


Lien : France-Culture

Mise à jour le Vendredi, 21 Juin 2013 11:54
 


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